100 Ans de Solitude
Publié le 3 Avril 2025
Je viens de terminer de lire le roman "100 Ans de Solitude" de Gabriel García Márquez. Ce livre, un classique de la littérature, m'a beaucoup plu. Plus j'avançais dans ma lecture, plus je me sentais captivé par l'histoire et les personnages, jusqu'à arriver à la fin où j'étais complètement estomaqué.
C'est l'histoire de la famille Buendía sur cent ans dans le village fictif de Macondo, en Colombie. On suit les personnages de génération en génération. Les enfants portent des noms identiques d'une génération à l'autre, ce qui rend l'histoire plus difficile à suivre, mais chaque personne portant le même nom partage un caractère semblable, entraînant une certaine répétition.
Chaque personnage est isolé et se sent seul, bien que la famille soit nombreuse et vive ensemble. La vie reflète le caractère des hommes et des femmes, ainsi que la société en général. Comme quoi, la solitude n'est pas nouvelle, mais elle peut être une expérience partagée.
Le livre ayant été écrit il y a presque soixante ans, il ne porte pas cette vision "nous sommes tous égaux" ou "woke" que l'on retrouve aujourd'hui. Cela permet d'avoir une perspective sur les individus différente de celle que proposerait un roman contemporain. Voici ce qui m'a marqué dans ce roman.
Les hommes
Avoir un objectif
Les hommes s'obstinent dans une quête individuelle. Que ce soit déchiffrer des parchemins, mener des expériences scientifiques, partir à la guerre ou fabriquer des petits poissons, ils ont tous une mission personnelle. Ils s'y lancent tête baissée, au point d'oublier tout le reste. José Arcadio Buendía, le patriarche et fondateur de Macondo, consacre sa vie à chercher la pierre philosophale ou bien son fils le colonel Aureliano qui se lance dans une guerre révolutionnaire sans fin menant 32 soulèvements.
Ils sont tous ainsi. Je pense que l'homme, contrairement à la femme, a besoin d'une quête, une raison de vivre. C'est quelque chose que l'on observe presque exclusivement chez les hommes. On connaît tous un homme qui se donne à fond dans son travail ou qui se lance dans un objectif démesuré, comme accomplir un Iron Man ou retaper une maison entière.
L'obsession pour une femme et les choix insensés
Le second point intéressant chez les hommes dans le roman est leur obsession pour une femme. Ils font tous des choix insensés par amour. Ils perdent la raison et le contrôle lorsqu'ils sont amoureux, prêts à tout changer pour elle. Par exemple, le premier fils José Arcadio quitte sa famille sans prévenir pour partir avec les gitans après avoir trouvé l'amour chez une gitane. Il revient à Macondo et tombe éperdument amoureux de Rebeca, sa sœur adoptive. Il abandonne tout sens moral et défie les conventions en l’épousant, au point de s’exiler avec elle hors du village.
Point intéressant : ils sont à la fois fous amoureux d'une femme, mais ont aussi, à d'autres moments du roman, des relations sexuelles avec d'autres femmes, parfois sans aucun sentiment, menant même à des enfants. Une totale dissociation entre leur amour et leur sexualité. C'est un fait courant dans la culture, y compris actuelle, mais auquel je ne comprends pas comment cela est possible.
Ursula, la mère et fondatrice de Macondo, observe ce schéma se répéter chez ses enfants et petits-enfants. Il en va de même pour leur quête personnelle. Elle tente de les empêcher de prendre ces décisions insensées, mais plus le temps passe et les générations se succèdent, plus elle réalise que c'est peine perdue, qu'elle ne pourra jamais les arrêter.
C'est la thématique principale du roman : les générations se suivent, mais les erreurs restent les mêmes, comme si ces comportements étaient inscrits dans notre ADN, une étape obligatoire de notre vie.
Je trouve cela intéressant, car c'est une réalité que j'observe aussi. Les hommes semblent avoir besoin de deux piliers dans leur vie : une quête personnelle et une relation (sexuelle) avec une femme à laquelle ils sont dévoués. C'est peut-être réducteur, mais je crois que c'est profondément ancré en nous.
Les femmes
L'égocentrisme
Dans le roman, les femmes sont égocentriques. Certes, les hommes sont obstinés dans leurs quêtes, mais ils s'intéressent au moins un peu à leur femme et leurs enfants. Les femmes, elles, sont centrées sur elles-mêmes à un degré bien supérieur, à l'exception d'Ursula, qui est une figure à part, vivant presque tout au long du roman. Elles se focalisent uniquement sur leurs propres sentiments, insensibles à ceux des autres.
La jalousie
Les femmes sont extrêmement jalouses entre elles. Elles n'éprouvent aucune jalousie envers les hommes, un comportement totalement absent chez ces derniers dans le roman. Leur jalousie est si forte qu'elles sont prêtes à commettre des actes pour voir d'autres femmes échouer ou souffrir. Certaines se réjouissent même de la mort d'une rivale. Comme pour les hommes, Ursula tente en vain de les en empêcher pour le bien de tous. Mais plus le temps passe et les générations se succèdent, plus elle comprend que c'est dans leur nature.
Aucun loisir
Les femmes semblent ne pas avoir de loisirs dans le roman. Elles ne s'intéressent à rien, n'ont aucun projet ni ambition. Même celles qui ont étudié n'en avaient pas vraiment envie. Je trouve cela étrange, mais cela reflète l'image que j'ai des femmes d'aujourd'hui. Un roman d'une autre époque montre que les comportements des hommes et des femmes étaient identiques à ceux d'aujourd'hui. C'est quelque chose qu'on ne peut plus dire de nos jours sans risquer de passer pour misogyne. Pourtant, les faits sont là, et nous l'apprenons de force. Lire un roman d'une autre époque permet de comprendre que nous ne sommes pas seul à observer ce phénomène.
La bipolarité
Les femmes dans le roman sont bipolaires. Elles désirent une chose et, le lendemain, veulent son opposé. Elles ressentent des émotions intenses, puis l'inverse le jour suivant. Par jalousie, elles sont capables de tout. Elles peuvent être follement amoureuses d'un homme, le considérant comme idéal et étant prêtes à tout pour lui. Mais dès qu'un homme jugé meilleur apparaît, le premier disparaît de leurs pensées comme s'il n'avait jamais existé, sans plus aucun sentiment pour lui. Sa mort leur serait indifférente; il devient insignifiant. C'est un comportement que j'ai observé plusieurs fois chez les femmes, mais que je n'ai jamais vu chez les hommes.
L'archetype masculin
Le concept du Giga Chad n'est pas nouveau. Le marin grand, tatoué et aventurier fait fureur auprès des femmes de Macondo, tout comme l'homme riche et pilote d'avion. Ces préférences sont ancrées en nous.
La violence appréciée
Enfin, le point le plus troublant : les femmes semblent apprécier être forcées, à la limite du viol. Je trouve cela très étrange, mais cela revient à plusieurs reprises dans le roman, bien que écrit par un homme. On retrouve ce thème chez des autrices comme Ayn Rand, avec des scènes de viol dans ses romans, ou dans la communauté Dark Romance, très populaire sur les réseaux sociaux. Si l'auteur dépeint ces scènes à répétition, ce n'est pas un hasard; il a dû vouloir illustrer ce comportement ambivalent chez les femmes. Vu d'un regard masculin, cela reste très déroutant.
Comme pour les hommes, j'ai trouvé cela intéressant cette représentation de la femme. Cela permet de reconnaître des traits de caractère et de les mettre en relation avec nos propres observations.
Les autres faits marquants
Les aléas de la vie
Parfois, tout peut changer du jour au lendemain. La vie est incertaine. Cela peut sembler cliché, mais je trouve cela frappant. À plusieurs reprises, des hommes meurent bêtement par "hasard". Je pense à la fin du roman, quand Arcadio est tué par les quatre enfants, ou quand le dernier des dix-sept Aureliano recherchés revient à la maison. Méconnaissable avec son allure de SDF, il est rejeté par ses frères et tué par deux gendarmes qui l'avaient reconnu. Tout peut basculer en un instant. Le roman regorge d'exemples, comme l'arrivée du train qui révolutionne le village.
La propagande
Le passage sur la grève dans la plantation bananière est l'un des plus marquants. Le gouvernement envoie l'armée nationale, tue 3000 grévistes et jette leurs corps à la mer. Cet événement est vite effacé par une propagande massive orchestrée par le pouvoir. En quelques années, les citoyens l'ont complètement oublié et doutent même de sa réalité. Cela m'a rappelé la propagande subie pendant le Covid: la population a vite oublié et ne réalise pas à quel point elle a été manipulée par le gouvernement.
Le temps érode les souvenirs
Le temps fait tout oublier, au point d'en douter. C'est assez triste, mais tout s'éteint avec le temps. À la fin du roman, plus personne ne croit aux exploits du colonel Aureliano Buendía. Mort depuis longtemps, il sombre dans l'oubli, et les gens doutent même de son existence, le reléguant au rang de légende. Il en va de même pour la bananeraie : après le départ des exploitants, quelques années suffisent pour que tout soit effacé, au point que les habitants doutent qu'elle ait jamais existé.
À 31 ans, je ressens déjà cela. Des événements d'il y a 5 ou 10 ans n'ont plus d'importance pour la société. Il faut rester pertinent, car nos prouesses perdent vite toute valeur.
Les enfants et la descendance
Ce qui a permis de perpétuer l'histoire de la famille Buendía, ce ne sont pas leurs faits parfois exceptionnels, mais les générations successives qui ont transmis leur histoire. Pour les personnages sans enfants, leur mémoire s'est arrêtée net, sombrant immédiatement dans l'oubli. À la fin du roman, quand le dernier descendant de la famille Buendía meurt, dévoré par les fourmis, tout s'éteint. C'est comme si la grande famille Buendía n'avait jamais existé.
C'est une leçon précieuse. Combien de personnes nées avant 1800 connaissons-nous ? À part quelques figures comme Napoléon, aucun nom ne nous vient. Et pourtant, c'était il y a seulement 200 ans. Tout disparaît bien plus vite qu'on ne l'imagine. La seule trace durable que nous puissions laisser est la transmission de nos gènes. À une époque où le taux de fécondité baisse, il est essentiel d'y réfléchir si l'on veut éviter de finir comme les Buendía.
Conclusion
J'ai trouvé ce livre exceptionnel. À travers toutes ses péripéties, il offre des leçons importantes, propres à chaque lecteur. Je suis persuadé que d'autres auront une interprétation totalement différente de ce chef-d'œuvre. C'est ce qui distingue un classique d'un livre ordinaire: chaque lecture est unique et apporte une nouvelle perspective.